30 avril 2022
Espace René Lebas // Autre Lieu studio P200

Cannibale _Tropical Garage Rock

+++ Un jour, il faudra sérieusement se pencher sur le sujet. Peut-être sortir une étude anthropo-ethno-socio-musicologique. Comprendre comment, depuis un salon de l’Aigle, Cannibale a poli un son à mi-chemin des Caraïbes, de la scène garage de la côte ouest américaine des années 1960 ou du Brésil de Tropicalia. Parce que moi, j’y ai passé quelques vacances dans ce coin de l’Orne, et ça transpirait pas vraiment le soleil et le psychédélisme.

Ces derniers temps, ils ont « appris à ne rien faire ». En ne faisant rien, ils ont composé leur troisième album, Life is Dead. Pas de doute, les influences, le son et le sceau Cannibale sont là et impriment une nouvelle fois instantanément. Et à l’ère du post-tout, ce Life is Dead sonnerait bien comme du post-Cannibale. Mijoté, rongé jusqu’à l’os, tout dans ce disque apparaît plus précis, plus macéré.

Chez eux, il y a toujours cette méthode de travail, aussi libre dans l’expérimentation que mathématique dans sa redondance, et qui tisse le lien entre leurs albums. Tous les jours, dans les embruns botaniques et éthyliques de sa tanière de l’Aigle, Manuel bouine, bidouille des instruments et « dégueule la musique », dans le but de plaire aux copains du groupe. « C’est une musique chaloupé, et à un moment, tu vas forcément commencer à dodeliner du cul » dixit Fabrice Gilbert, chanteur de Frustration, qu’on entend sur le morceau Kings of the Attics, et pourtant davantage habitué aux corps à corps dans les fosses qu’aux passionnés déhanchés.

Cette infusion faite d’instinct et de séduction rejaillit sur la vaporeuse musique du groupe et dans les textes oniriques de Nicolas. Life is Dead s’annonce encore comme un sacré producteur d’imaginaires et de spasmes incontrôlés du bassin et des boyaux de la tête. Prenons cette basse tambour et ces petits coups de canif de guitare sur The Hammer Hits ou le tachycardique Kings of the Attics, autour des tribulations d’un groupe d’ados en répèt’. Un morceau un peu à part, le dernier composé, où Manuel « a pour la première fois l’impression d’avoir atteint [s]on idée de non-mélange entre de la new-wave et de la musique caribéenne. »+++